Top départ pour les candidats aux élections législatives ! Ce lundi 10 juillet lance le coup d’envoi de la campagne pour une élection prévue le 30 juillet. Celle-ci s’annonce d’ores et déjà mouvementée : pas moins de 47 listes différentes sont en lice ! Une pluralité, signe de démocratie, qui risque cependant de perdre l’électeur dans cet océan de possibles. Ces législatives voient aussi le retour dans la course de l’ancien président Abdoulaye Wade et posent la question de l’avenir politique du maire de Dakar, Khalifa Sall, toujours emprisonné pour détournement de fonds présumé.
En 2012, les Sénégalais avaient déjà eu le choix entre 24 listes. Mais cette année, pour les élections législatives du 30 juillet, c’est un record ! Les électeurs ont l’embarras du choix : 47 partis ou coalitions en concurrence directe pour l’accès à la députation. Une offre pléthorique qui pourrait bien déstabiliser les citoyens : comment choisir ses députés parmi tant de candidats ? Des électeurs dépassés donc avec derrière, le risque que le scrutin s’en trouve perturbé et que l’abstention explose.
Le scrutin du 30 juillet doit renouveler l’Assemblée nationale. Depuis la révision constitutionnelle de mars 2016, le nombre de sièges doit passer de 150 à 165, 15 sièges de députés étant ouverts pour représenter la diaspora sénégalaise.
Une opposition divisée
Parmi les 47 partis/coalition en lice pour la députation, deux se démarquent. Il s’agit bien-sûr de celle dirigée par l’ex-président Abdoulaye Wade (2000- 20012) et du maire de Dakar, Khalifa Sall, toujours emprisonné pour détournement de fonds présumé. Faute d’unité, les deux opposants à Macky Sall, mèneront chacun leur liste. Une coalition plus large de l’opposition, composée de 40 à 50 partis, mouvements ou associations, avait pourtant été envisagée fin avril. Mais le Parti Démocratique Sénégalais (PSD) de Wade, et les partisans du maire de Dakar, n’ont pas réussi à s’entendre sur la personne devant être tête de liste. L’entente, qui souhaitait imposer une cohabitation à l’actuel président qui contrôle l’Assemblée Nationale, a donc volée en éclat.
Deux candidats phares donc, bien connu des Sénégalais. A 91 ans, Abdoulaye Wade ne lâche rien : l’ancien président est en effet tête de liste de la coalition Wattu Senegaal. Une victoire aux législatives pourrait permettre d’obtenir l’amnistie pour son fils, ancien ministre, Karim Wade. Ce dernier avait été condamné en 2015 à six ans de prison pour enrichissement illicite. Il a finalement bénéficié d’une grâce présidentielle en 2016 mais vit depuis à l’étranger.
De son côté Khalifa Sall, principal opposant à Macky Sall, mènera sa campagne depuis la prison de Rebeuss ou il est emprisonné depuis mars. Une situation que dénoncent ses partisans, accusant le pouvoir d’instrumentaliser la justice en vue des législatives. Depuis son incarcération, le maire de Dakar jouit d’une forte popularité et ses soutiens se sont multipliés. Si le maire devait être condamné, il perdrait sa mairie et risquerait l’inéligibilité. Mais en attendant, il est bel et bien candidat et toujours présumé innocent.
Une organisation mise à mal
Cette multiplication de candidatures, fai inédit au Sénégal, pose la question de l’organisation de la tenue de ces élections législatives. Les bureaux de vote vont surement être bien plein le 30 juillet, pour ne pas dire totalement saturés ! En moyenne, chaque citoyen consacrera 4 minutes pour voter. « Sachant que chaque bureau de vote compte environ 600 inscrits, même si seulement la moitié se déplace, celle-ci mettre au moins 20 heures pour voter » expliquait au “Monde Afrique” Ndiaga Sylla, coordinateur du département « démocratie et processus électoraux » au sein du Groupe de recherches et d’appui conseil pour la démocratie participative et la bonne gouvernance (Gradec). Embouteillage assuré et manque de place prévisible donc ! Pas certain qu’un report de l’heure de fermeture des bureaux de vote (prévue au départ à 18 heures) ne soit suffisant pour gérer l’affluence et permettre à tous de voter…
Avec autant de participants et d’électeurs, le bon déroulement du scrutin est fragile car plus facilement exposé à des risques de fraudes ou de manquement à la législation. Sans compter qu’entre certains bulletins, les confusions sont faciles, surtout quand les couleurs ou les noms sont très semblables. Il y a de quoi se perdre ! Une confusion qui ne facilite pas le choix déjà complexe des Sénégalais.
Même du côté des médias, on se demande comment faire pour donner aux 47 listes un temps de parole équitable, ou encore pour couvrir les élections dans chaque camp…
Vers un fort taux d’abstention ?
Ces problèmes organisationnels pourraient aussi avoir comme conséquence de décourager les électeurs et ainsi réduire le taux de participation à ces élections. La tentation de l’abstention est très élevée. En 2012, avec 24 listes présentées, 63 % des inscrits sur les listes électorales, soit 3,4 millions d’électeurs, ne s’étaient pas déplacés pour voter. Un pourcentage conséquent. Beaucoup de Sénégalais déclarent déjà qu’ils ne se déplaceront pas le 30 juillet, faute d’être certain de pouvoir vraiment voter.