Habituellement prévue le 1e décembre, le Sénégal a célébré la Journée mondiale de lutte contre le Sida avec une cérémonie organisée le 29 novembre, pour cause de Maouloud. A cette occasion, le compte à rebours en vue de l’éradication totale du Sida d’ici 2030 a été lancé. Un objectif affiché qui a aussi permis de faire le point sur la situation de la pandémie dans le pays et sur les défis qu’il reste encore à relever afin d’y mettre un terme.
Depuis 1988, le 1er décembre est désigné par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), comme la Journée mondiale de lutte contre le Sida. Dépistage, informations et prévention de la maladie sont au cœur des discutions de cette journée. En 2016, un million de personnes dans le monde sont mortes des suites du VIH. Si les chiffres sont en baisse depuis dix ans, la situation reste préoccupante et la pandémie sévit toujours, notamment au sein de certaines populations « à risque ».
Le 29 novembre 2017, les acteurs de la lutte contre le SIDA au Sénégal se sont donc réunis sur la place du souvenir africain. Lors de la cérémonie officielle, ces derniers ont procédé au lancement du compte à rebours pour aller vers l’éradication du Sida d’ici 2030. «Nous avons décidé d’affirmer notre mobilisation de chaque instant dans cette phase de la lutte en enclenchant symboliquement le compte à rebours nous conduisant vers la fin de l’épidémie», a déclaré lors de cette journée le Pr Cheikh Tidiane Ndour, chef de la Division de lutte contre le SIDA (DSL). En 2016, le Sénégal comptait environ 46 000 porteurs du VIH/Sida dont 4 800 enfants. Le pays est parmi l’un des moins affecté du continent. Au niveau mondial, 36,7 millions de personnes dont 1,8 million d’enfants vivent avec le VIH. Depuis quelques années, le gouvernement a adopté la stratégie Tatarsen (Test and Treat and Retain) dans sa lutte contre le SIDA. Il s’agit de dépister, traiter et retenir les personnes vivant avec le VIH au point de rendre leur charge virale indétectable.
Des progrès encourageants…
C’est un défi osé que se sont lancés les ONG, membres de la société civile et du gouvernement : treize ans pour faire disparaitre le SIDA du Sénégal. Mais d’après la secrétaire exécutive du Conseil National de Lutte contre le Sida (CNLS), le Dr Safiétou Thiam, ce rêve pourrait tout à fait être réalisable au regard des avancées constatées. Le taux de prévalence est passé ces dernières années de 0,7% à 0,5%, « même si dans les groupes les plus touchés la prévalence reste élevée, on observe une baisse significative » a-t-elle relevé. Les nouvelles infections ont quant à elles baissées de moitié, tout comme le nombre de décès liés au SIDA. « Le nombre d’adultes mis sous AVR (antirétroviraux = médicaments empêchant la prolifération de virus et infections) a augmenté, passant de 137 en 2001 à 21 157 en 2016. Le traitement est donc devenu une réalité sur tout le territoire national », a-t-elle ajouté. Concernant ces antirétroviraux, la tendance reste croissante depuis plusieurs années grâce aux efforts déployés par les structures de prise en charge.
Le rapport d’analyses et de cartographies régionales 2016 révèle que Dakar est la région la plus touchée. Le taux de prévalence y est de 0, 4% et la capitale compte aussi le plus grand nombre de patients VIH. Plusieurs facteurs, tels que la pauvreté, la prostitution clandestine et officielle, l’ignorance, la mobilité et nombreuses migrations ou encore la consommation d’alcool, expliquent ces chiffres plus élevés. Les populations les plus touchées par le virus restent les hommes homosexuels (21,5%), les travailleuses du sexe (19,8%) et les consommateurs de drogues (10,2%). L’épidémie a aussi tendance à se féminiser depuis quelques années avec un ratio qui est passé de 4 hommes pour 1 femme en 1986 à 1 homme pour 2 femmes en 2007.
©Dakaractu
…qui ne masquent pas la situation
Ce tableau plutôt optimiste ne doit pas pour autant faire oublier que la situation reste préoccupante. De nombreux obstacles demeurent et malgré ces avancées non négligeables, l’objectif 2030 défini au niveau mondial semble difficilement atteignable.
Selon Dr Safiétou Thiam,
« il faut supprimer toutes les barrières sociales qui empêchent tant d’hommes, de femmes et d’enfants d’obtenir les soins et les traitements nécessaires.»
Demba Koné
, directeur Sénégal pour ONUSIDA, a lui rappelé que « le monde ne pourra pas atteindre l’objectif de mettre un terme au sida d’ici 2030 si le droit à la santé pour tous n’était pas garanti ». Or en Afrique, « 2 personnes sur 3 n’ont pas accès au traitement » a-t-il rappelé. L’accessibilité et la disponibilité à la prévention et aux traitements restent en effet un problème récurrent notamment auprès des personnes démunies.
Autre obstacle de taille évoqué par Ciré Lo, représentant des personnes vivant avec le VIH (RNP+) : la discrimination et la marginalisation. Les fausses croyances et le manque de connaissances sur la transmission du SIDA entravent les efforts de prise en charge et de lutte contre la maladie. Comme le note le Dr Safiétou Thiam, « les femmes sont généralement plus touchées par le VIH mais elles viennent aussi plus nombreuses se faire dépister et surtout soigner. Les hommes doivent également faire cette démarche ».
Il y aurait environ 20 % d’enfants atteints du SIDA au Sénégal. Afin de réduire ce nombre, la secrétaire exécutif du CNLS recommande un suivi rigoureux des futures mères porteuses du VIH, mais aussi un traitement de ces enfants.
«Nous ne devons pas avoir une approche à deux vitesses pour mettre fin à l’épidémie du Sida, parce que malgré tous les succès, le Sida n’est pas encore terminé» a conclu le directeur Séngal de l’ONUSIDA.
Rapport 2016 du CNLS
RAPPEL :
*Le dépistage du SIDA est gratuit pour tous.
*Le seul moyen de protection efficace contre le VIH/Sida, mais aussi contre les IST (Infections Sexuellement Transmissibles), reste le préservatif.