Le designer Ousmane Mbaye revient à la galerie le Manège avec sa nouvelle exposition “Graphik”, dans laquelle il propose une collection de meubles designs. L’occasion pour nous de le rencontrer et d’en savoir un peu plus sur cet Homme avec un grand “H”.
Lorsqu’on pénètre dans la galerie le Manège de l’Institut Français, aucun doute, on retrouve bien le style si singulier d’Ousmane Mbaye, mais cette nouvelle collection se veut plus fraîche et légère, avec de nouvelles couleurs, soulignant la force et le dynamisme des oeuvres.
“J’ai voulu traiter la couleur comme la matière, ce qui me permet mieux d’exprimer cette sensibilité qui est en moi”, explique le designer qui confie transposer ses émotions sur ses créations. “Dans cette nouvelle collection, il n’y a aucun recul, tout est neuf. Avant, j’étais dicté par les coloris que je trouvais, car j’utilisais des fûts de pétrole et des barils qui ne me permettaient pas d’explorer tous les horizons. Aujourd’hui, je travaille mes propres couleurs, et je sors de ce cliché “récupération” que l’on retrouve beaucoup en Afrique.”
L’exposition Graphik est par ailleurs une oeuvre d’art à elle seule : “les objets sont composés comme une photographie de maître, avec des pleins et des vides, des lignes de force et de tension, des angles et des contrastes équilibrés”, résume-t-on dans le descriptif de l’exposition.
“Je veux générer du bonheur, donner du plaisir aux gens”
Lorsqu’on demande à Ousmane Mbaye de nous parler de cette exposition, il nous retourne la question et demande : “Et-vous, qu’en pensez-vous, que ressentez-vous ?” Pour ce designer au grand coeur, les objets parlent d’eux mêmes et tout est une question de ressenti personnel. “Ce que je souhaite à travers mes créations, c’est générer du bonheur, donner du plaisir aux gens. Il faut travailler avec amour et envie, car nos émotions font partie de notre créativité, et elles se retrouvent dans notre travail”, explique-t-il en soulignant que les valeurs qui lui sont chères sont la simplicité, l’amour, le partage et les rencontres. Les créations d’Ousmane Mbaye sont des objets qui vivent, qui racontent une histoire, une émotion mais ce sont aussi des oeuvres d’art que l’on peut insérer dans son quotidien.
Cet autodidacte s’est lancé il y a dix ans dans le design, et malgré le succès – national et international – qu’il rencontre, il reste simple, généreux, humain et surtout sincère. Il conçoit ses créations avec ses ouvriers dans son atelier à Soumbedioune, en face du marché aux poissons, un quartier qu’il aime particulièrement à Dakar et qui l’a influencé tout au long de sa carrière. “J’aime confronter l’art aux gens du quotidien, ceux qui passent devant mon atelier, et Soumbedioune se prête bien à cela”, explique Ousmane Mbaye qui se veut, plus que jamais, accessible au grand public.
“On ne peut pas parler d’émergence ou de développement si ce qu’on consomme vient d’ailleurs”
Ousmane Mbaye n’est pas simplement un designer, c’est aussi un patriote. Et s’il y a bien une chose qui lui est chère, c’est le développement de son pays, et cela passe par le design :
“Il y a quelque chose qui me touche particulièrement sur cette collection, car elle est arrivée à un stade de ma vie où je suis en grande réflexion sur l’Afrique, sur ce continent, sur mon pays : 95 % de ce que l’on consomme vient de l’étranger, et un pays comme le Sénégal n’a pas d’école de design. On ne peut donc pas parler d’émergence ou de développement si ce qu’on consomme vient d’ailleurs. Je suis donc en train de tout faire pour qu’une école de design voit le jour au Sénégal. Cela nous permettra de consommer ce que l’on produit et ce sera déjà une grande victoire”.
4 Questions à Ousmane Mbaye
Ousmane Mbaye a bien voulu se prêter à notre interview “4 questions à…”, afin d’en savoir un peu plus sur lui.
Qu’est-ce qui vous plaît dans votre métier ?
J’aime avant tout créer du bonheur et le transmettre aux autres, j’aime faire plaisir, j’aime le concret, le fait de voir le produit fini. J’aime aussi beaucoup l’idée de créer de l’emploi grâce à mon activité.
Un endroit où vous aimez flâner à Dakar ?
Il y en a énormément, mais je dirais tout d’abord la Corniche, car j’aime la mer. Je connais plein de petits coins secrets sur la plage où l’on peut pêcher.
Ensuite, il y a l’île de Gorée. Cet endroit m’apaise et m’inspire. C’est le Sénégal sans être le Sénégal, c’est un endroit comme il n’y en a nulle part ailleurs.
Puis il y a la Medina, c’est mon quartier préféré. C’est un endroit plein de vie, ça grouille, il y a des gens partout. Tout est mélangé et en même temps soudé. Cette union me touche beaucoup.
Un endroit où vous aimez aller manger ?
J’adore aller à Soumbedioune, lorsque les pêcheurs ramènent du poisson et le font griller. Un régal ! Après il y a le Djoloff à Fann Hock, où j’aime beaucoup aller manger, et le Glacier Régis pour prendre une bonne glace. Sur l’île de Gorée, il y a un petit resto sans prétention qui fait de très bonnes grillades : Chez Mam Penda.
Qu’est-ce qui vous rend fier de votre pays ?
Ce sont les valeurs des gens : le respect, le partage, la bravoue, la dignité, la débrouille. Sans partage, ce pays serait parti en fumée depuis longtemps. On oublie parfois que ces valeurs font partie du Sénégal, mais dès qu’on se met à creuser un peu, on voit que c’est toujours là, partout autour de nous.
Expositions “Grafik”- jusqu’au 16 avril à la galerie Le Manège, 3 rue Parchappe, Dakar Plateau. Entrée libre.